La défaite est orpheline et la victoire a plusieurs papas. Le capitaine des Eléphants ne croyait pas si bien dire. Sauf que, cette assertion, vieille comme le monde, fait partie du train-train quotidien de ce jeu de balle. Et à tous les pratiquants de sport, qu’ils soient individuel ou collectif, ne l’ignorent point. Mais, Max Gradel, a cependant tenu à le dire devant le chef de l’Etat. Une façon sans doute d’exprimer toute la souffrance qu’ils ont endurée, après le 0-4 de la Guinée Equatoriale. Ainsi que toute la solitude dans laquelle ils se sont trouvés être enfermés après la débâcle du 22 janvier. S’il avait voulu dénoncer le lynchage systématique dont ils ont fait l’objet de la part des Ivoiriens que Gradel ne s’y serait pas pris autrement. Au demeurant, ce n’est pas un secret. La victoire rassemble. Mais la défaite isole le perdant. Autrement dit, le vainqueur est porté au pinacle. Le vaincu cloué au pilori. En clair, ce que Gradel a dit devant ADO n’est pas nouveau. Car, depuis Mathusalem, le sport célèbre les héros et il crucifie les vaincus. Dès lors, il était maladroit que l’adresse du porte-parole des joueurs s’attardât sur la persécution morale dont les Eléphants ont été l’objet. Les méchantes railleries et quolibets qu’ils ont essuyés après cette défaite de la part de leurs supporters sont des contradictions secondaires. Car, le principal ici, reste cet enthousiasme général et cette ferveur populaire qui ont accompagné leur sacre. Ainsi que la reconnaissance de la nation dont ils ont fait l’objet hier. Ce même public qui les a boycottés hier, était encore présent dans les rues d’Abidjan pour accompagner leur caravane lundi dernier. Ceci étant, si les Ivoiriens ont été mécontents de leur prestation face à la G. Eq, s’ils les ont hués et traités de tous les noms d’oiseaux, c’est plutôt la façon dont ils ont perdu qui leur a fait mal. Et a poussé les supporters à l’excès. Et à cette dérive langagière. Sinon, les Eléphants ont été battus par le Nigéria. Mais cela n’a pas irrité les supporters. Mieux ou pis, ils ont tourné cela en dérision : « C’est notre CAN. On gagne quand on veut, on perd quand on veut. » On les a vus encore inventé cette chanson, après le repêchage des Eléphants : « Maroc merci » ou « on ne vaut rien, mais on est qualifiés ». Ne sont-ce pas aussi les mêmes Ivoiriens qui ont résonné la mobilisation durant les 4 derniers matches conduisant au titre ? Bien sûr que oui. Ils ont aussi pris énormément de risques en effectuant de longs trajets pour supporters l’EN jusqu’au sacre final. D’autres ont même perdu la vie à cause des Eléphants. Le fait donc d’insister sur l’isolement dont ils ont fait l’objet, devant le chef de l’Etat n’était franchement pas nécessaire. L’heure étant à la fête, il était inutile de s’appesantir sur cet épiphénomène. Sauf, si bien entendu, c’était un coup monté pour faire « l’attalaku » de leur président de la FIF devant le Prado. Et la façon dont le porte-parole a répété son nom dans son intervention n’est pas anodine. Bon DD rôdant dans les parages, il fallait bien trouver une astuce pour soigner son image devant le PR. Et les héros du jour ont su jouer le jeu.
Kambiré Elie